Depuis des années, nous sommes à la recherche de l’entretien de Laurence Bourne (1936-2012)1 mené par Alex Taylor, à l’occasion de la rediffusion en France des épisodes de Chapeau melon et bottes de cuir en VOSTF su FR3.

L’été 1991 voyait revenir à l’écran la saison 1965/1966, et l’été suivant, en 1992, la saison 1967. En 1991, c’est Laurence Bourne – réalisateur de trois épisodes avec Honor Blackman (L’Éléphant blanc, Les Petits miracles, Le Cheval de Troie) – qui avait été interviewé. Mais, hélas, l’INAthèque ne conserve aucune trace des émissions de Continentales diffusées en juillet et août 1991.

En revanche, nous avions eu la chance de remettre la main sur l’entretien du scénariste John Lucarotti (The Far Distant Dead, La Baleine tueuse, Mort à la carte, L’Éléphant blanc, Le Fantôme du château De’Ath), réalisé en 1992 par Alex Taylor, que nous avons retranscrit dans un billet en avril dernier.

Pour nous consoler un peu, voici aujourd’hui la transcription d’un court entretien de Laurence Bourne par Alain Carrazé et Jean-Pierre Dionnet, enregistré pour l’émission spéciale de Destination Séries diffusée sur Canal Jimmy le 7 août 1992. Ces émissions, malheureusement, ne sont pas accessibles dans leur intégralité : ni sur les plateformes vidéo, ni même à l’INAthèque (où elles ne peuvent être consultées que sur place, dans de rares médiathèques). Et c’est vraiment regrettable.

Entretien

AC : Bonjour, monsieur Laurence Bourne, merci d’être avec nous.
LB : Merci à vous.

AC : Comment avez-vous débarqué, au tout début, sur Chapeau melon et bottes de cuir ?
LB : Je travaillais comme réalisateur à ABC Television sur une série qui avait, à l’origine, Ian Hendry pour vedette. Alors que j’y collaborais, elle a évolué. Ils ont retenu l’idée que Patrick Macnee, qui avait jusque-là un rôle secondaire dans Police Surgeon, ait une série à lui. Ce fut The Avengers2.

AC : Comment se passait le tournage des épisodes à cette époque ?
LB : On faisait cela en direct, et c’était très dur pour les nerfs, parce que la moindre erreur se répercutait dans toute l’Angleterre. Les réalisateurs, les cameramen, les ingénieurs du son… tout le monde était sur les dents pendant le tournage de chaque épisode.

AC : Bon, et le tournage, ça se passait comment concrètement ?
LB : On avait dix jours de répétition et deux jours de studio. On était à l’antenne à la fin du deuxième jour, en espérant que tout se passe bien.

JPD : Est-ce que c’était facile de travailler avec Patrick Macnee ?
LB : C’était formidable. C’était un homme merveilleux, très anglais, très correct, bien élevé. C’était une joie de travailler avec lui3.

JPD : Et quand la série a eu du succès, est-ce qu’il n’a pas attrapé, comme on dit, la grosse tête ?
LB : Oh non. Le rôle que Patrick joue dans la série lui ressemble beaucoup : le gentleman-farmer anglais typique, diplômé d’Eton, bon cavalier, etc. Cela a été facile pour lui de jouer le rôle de John Steed.

AC : Et techniquement parlant, tourner des épisodes en direct, cela devait être très compliqué, non ?
LB : Bien sûr, puisque nous travaillions en direct. Nous n’avions que quatre caméras sur le plateau, et les décors étaient conçus et mis en place en cercle pour nous permettre de tourner avec les caméras tour à tour. Les décors étaient construits en rond, et c’est pour cela que vous n’aviez presque jamais deux scènes se déroulant dans le même décor. Les caméras tournaient autour du studio4. C’était très compliqué.

JPD : Comme vous tourniez en direct, est-ce qu’il arrivait parfois que vous ayez des problèmes techniques ?
LB : Souvent ! Dans les scènes de bagarre, notamment avec Honor Blackman, sa position face à la caméra était définie par des marques au sol… qu’elle ratait souvent ! Et lors d’une séquence qui est restée fameuse, son pantalon s’est déchiré ! Panique : on ne pouvait plus tourner ! Cela a été une des raisons pour lesquelles on avait décidé de lui faire porter du cuir. C’était plus solide, et cela ne risquait pas de se déchirer.

JPD : Quand vous avez réalisé Chapeau melon et bottes de cuir, vous doutiez-vous que cela allait devenir un classique ?
LB : Non ! Cette série a été populaire tout de suite. Elle était en tête des scores d’audience de la télévision anglaise en 1963, 1964 et 1965. Mais il y avait d’autres séries très populaires à l’époque. Cela m’a surpris d’aller l’année dernière au Grand Rex, à Paris, et de voir deux mille adolescents en délire lors de la projection de trois épisodes réalisés avant leur naissance ! C’est un grand plaisir pour moi de voir que les gens s’y intéressent encore.

AC : Eh bien, merci Laurence Bourne. On peut simplement espérer qu’on puisse un jour voir ces épisodes en France5.
LB : Merci.

Émission Destination Séries
Présentée par Alain Carrazé et Jean-Pierre Dionnet
Diffusée le 7 août 1992 sur


  1. Nous ne disposons pas de beaucoup d’informations sur Laurence Bourne. Né en juin 1936 dans le Hertfordshire (Angleterre, Royaume-Uni), il était réalisateur et acteur. Il a signé la mise en scène d’une quarantaine d’épisodes de séries tournés en vidéo. Il est décédé le 25 février 2012. ↩︎
  2. Patrick Macnee n’a jamais collaboré à Police Surgeon, en aucune manière. Laurence Bourne se trompe donc. De plus, s’il affirme y avoir participé, il n’a en réalité jamais réalisé d’épisode. À sa décharge, l’entretien date de 1992 — soit trente ans après les faits : qui se souvient avec exactitude de ce qui s’est passé trente ans plus tôt ? ↩︎
  3. Laurence Bourne confirme ce que nous savions déjà d’après de nombreuses sources. Linda Thorson l’avait d’ailleurs rappelé au décès de Patrick Macnee : tout le monde l’aimait. ↩︎
  4. Il s’agissait des studios de Teddington, conçus pour le cinéma au début du XXᵉ siècle, puis convertis pour le tournage en vidéo. Ils ont été démolis en 2013. ↩︎
  5. C’est chose faite puisqu’en 1997, pour la première fois en France, la nouvelle chaîne 13ᵉ Rue diffuse les épisodes avec Honor Blackman. Des DVD sous-titrés en français paraîtront par la suite. Puis la chaîne Arte se lancera dans la rediffusion intégrale, incluant l’époque vidéo de la série. ↩︎

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